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Etude de l’incidence des boiteries et de leurs impacts sur la production laitière des vaches laitières dans le subhumide tunisien

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R. Bouraoui1*

B. Jemmali1

N. M’hamdi2

C. Ben Mehrez1

B. Rekik1

 

1 Laboratoire d'Amélioration et de Développement Intégré de la Productivité Animale et des Ressources Alimentaires, Ecole Supérieure d'Agriculture de Mateur, Université de Carthage,

Tunisie

Institut National Agronomique de Tunisie, 1082 Tunis

 

Abstract - This study focused on the incidence of lameness and its impact on the performance of dairy cows. The study was conducted in the Chergui farm in the region of Mateur. There were 230 Holstein cows with mean age of 4.85 (± 1.73) years. Locomotion was evaluated over all cows every 15 days from february to april using the scoring grid of locomotion that assigns scores ranging from score 1 to score 5. Assessment of the state of cleanliness of the barn was performed by two grids with scores from 0 to 3. Furthermore, for each cow, milk yield was recorded and analyzed. Results showed that the incidence of lameness in the farm is around 38.71%, and the most frequent podal affections are located at the hind legs (57.3%). Diet and condition of the barn are identified as risk factors for podal disorders. Milk production is affected by lameness. Indeed, 95.63% of the variation in milk yield is caused by the locomotor score. The increase of one unit of the locomotor score resulted in a decrease of 2.14 kg milk / cow / day. In this work, there was a significant loss of 9.3 kg of milk / cow / day and an increase in somatic cells with the locomotor score. The control of the management of herd, animal comfort and food is essential to limit the effects of podal diseases.

 

Keywords: Dairy cow / lameness / food / barn / milk production.

 

Résumé - Cette étude ayant porté sur l’incidence des boiteries et de leurs impacts sur les performances de production laitière s'est déroulée dans la ferme Chergui de la région de Mateur, comportant 230 vaches de race Holstein d’âge moyen de 4,85 (± 1,73) ans. Une évaluation de locomotion se faisait sur toutes les vaches chaque 15 jours sur une période allant de février à avril en utilisant la grille de notation de la locomotion qui attribue des notes allant de score 1 à score 5. L’évaluation de l’état de propreté du bâtiment a été réalisée par deux grilles de notation de 0 à 3. De plus, pour chacune des vaches, les données de production laitière ont été collectées et analysées. Les résultats ont montré que la fréquence de boiteries au sein de la ferme est de l’ordre de 38,71%, et les affections podales les plus fréquentes se situent au niveau des pattes postérieures (57,3 %). L’alimentation et l’état du bâtiment sont identifiés comme des facteurs de risque des affections podales. La production laitière est influencée par le problème de boiterie. En effet, 95,63% de la variation de la production laitière s’explique par le score locomoteur. L’augmentation d’une unité de score induit une diminution de 2,14 Kg du lait/vache/jour. Dans ce travail, on a enregistré une perte significative de la quantité du lait de 9,3 Kg /vache/jour et une augmentation du nombre de cellules somatiques avec le score locomoteur. La maitrise de la conduite d’élevage, du confort des animaux et de l’alimentation s’avère indispensable pour limiter les effets des maladies podales.

 

Mots clés: Vache laitière / boiterie / alimentation / bâtiment / Production laitière.

 

 

1. Introduction

Pendant plusieurs années, les boiteries chez les ruminants étaient considérées comme des problèmes individuels et sans importance. Maintenant que l'on reconnaît leur importance économique ainsi que pour des raisons de bien-être, les boiteries sont en tête de liste des maladies importantes dans les troupeaux, c'est la troisième pathologie en élevage bovin, après les mammites et les troubles de la reproduction (Delacroix 2000). Selon Prodhomme (2011), la boiterie est un mouvement reflèxe qui tente de soulager la douleur ressentie. Les lésions du pied sont nombreuses et variées. Elles sont associées à trois maladies principales : le fourchet, la fourbure (subclinique ou chronique), la dermatite digitée ou maladie de Mortellaro (Delacroix 2000).

Le fourchet est une infection, aigue ou chronique, superficielle et contagieuse de l’épiderme sur la peau interdigitale, qui s’étend ensuite aux talons, sans extension aux tissus profonds (Delacroix 2000 ; Berry 2001). L'excès d'humidité et le mauvais entretien des onglons favorisent cette pathologie (Thierry 2013). La fourbure est occasionnée par la présence de toxines produites au cours de l’acidose ruminale (Gohier et Fournier 2000). La dermatite digitale, souvent appelée « maladie de Mortellaro », est une inflammation subaigüe, contagieuse et superficielle de la peau de la couronne de l’onglon, surtout coté talon, ou de l’espace interdigital (Andrews 2000). Elle se caractérise par l'apparition d'ulcères très douloureux en partie arrière de l'espace interdigité d'un ou plusieurs membres et sur plusieurs vaches simultanément.

Les problèmes de sabots et de boiteries chez les vaches laitières représentent un des enjeux majeurs pour la production laitière actuelle en plus de causer des douleurs et de l'inconfort aux vaches (Whay et al. 1997). Ainsi, pour un troupeau de 100 vaches, entre 12 et 25 cas de boiterie se développent à chaque lactation (Whitaker et al. 2002). Les problèmes de boiteries réduisent, entre autres, la longévité des animaux. Ceci entraine des pertes économiques pour les producteurs en plus des pertes monétaires directement liées aux boiteries telles que la réduction de la production laitière et de la fertilité (Seegers et al. 1998 ; Warnick et al. 2001).

Les vaches boiteuses passeront de plus en plus de temps couchées. Leur production de lait va baisser suite à une diminution de consommation d’aliments et d’eau (Hulsen 2006). Toutes les maladies podales touchant plusieurs animaux dans le troupeau (la dermatite digitale, le fourchet, la fourbure), et parfois enzootiques (panaris), provoquent au moins un inconfort ou bien des boiteries qui génèrent une baisse de production laitière individuelle, et une diminution du volume de lait vendu du fait des délais d’attente. De plus, le niveau de production maximum d’une vache peut ne plus jamais être atteint si elle a souffert de panaris (Green et al. 2002 ; Hernandez et al. 2002).

Au Royaume-Uni, on estime la perte de production laitière attribuable à la boiterie à 360 Kg sur 305 jours (Green et al. 2002). Certains types de boiterie peuvent avoir des effets encore plus marqués ; le piétin par exemple, peut entraîner une diminution de 10 % (environ 860 Kg sur 305 jours) de la production laitière (Hernandez et al. 2002). D’après Green et al. (2002), il ya une perte significative de 1,7 Kg/jour sur le mois suivant le diagnostic de la boiterie. Bareille et al. (2003) montrent une perte significative de 1,3 Kg/jour dans les semaines suivant le diagnostic. Bareille et al. (2003) présentent des résultats plus faibles sur 140 jours de lactation, de l’ordre de 80 kg de lait produit en moins pour une vache boiteuse comparée à une vache non atteinte. Une vache qui a de graves problème de pieds et membre peut perdre jusqu'à 36 % de sa production laitière et avoir 15,6 fois plus de chance d'être non gestante plus longtemps (Bouichou 2008).

 

2. Matériel et méthodes

2.1. Site d’étude

Cette étude est réalisée dans la SMVDA «CHERGUI» qui est une société de mise en valeur et de développement agricole crée en septembre 2008. Elle se localise à 2 km de la délégation de Mateur qui est située dans le gouvernorat de Bizerte au nord de la Tunisie. La région où se trouve l’exploitation appartient à l’étage bioclimatique subhumide à hiver doux. La superficie agricole totale (SAT) est de 617 ha, dont 201 ha sont irrigués par le réseau barrage Joumine. Le plan d’assolement pratiqué dans la ferme est un assolement de type triennal. La production à la SMVDA Chergui se caractérise par une diversité des cultures et des superficies. La production fourragère occupe une place importante par rapport aux autres exploitations.

 

2.2. Matériel animal 

La ferme Chergui, comporte 230 vaches de race Holstein présentant un âge moyen de 4,85 (± 1,73) ans. Les vaches sont logées en stabulation libre partiellement paillée de 2 rangées tête à tête et alloties en plusieurs lots dans des paillots suivant le stade de lactation et le niveau de la production laitière. Les lots 1, 2 et 3 pour les vaches en lactation et le lot 4 pour les vaches taries. L’alimentation des vaches est à la base de foin, ensilage, fourrage vert et l’aliment concentré (5 kg pour les vaches taries à 10 kg pour les vaches fraichement vêlées).

2.3. Méthodologie

2.3.1. Evaluations de la démarche des vaches laitières

Toutes les vaches de l’élevage bovin laitier de la ferme Chergui ont été utilisées pour faire des notations de locomotion. Chaque 15 jours, une évaluation de la locomotion se faisait en attribuant à chacune des vaches une note qui varie de 1 jusqu’à 5 et ceci selon la grille d’évaluation de la locomotion (figure 1) de Sprecher et al. (1997). Cette notation a été réalisée en cinq répétitions. La première a été effectuée durant le mois de février, la deuxième et la troisième notation au mois de mars et la quatrième et la cinquième notation au mois d’avril pour l’année 2014. Au cours de la notation de locomotion, la vache qui porte un score de trois et plus est considérée malade (boiteuse).

 

Figure 1. Grille de notation de la locomotion des bovins (Sprecher et al . 1997).

 

2.3.2. Evaluation de la propreté du troupeau

Pour une meilleure évaluation de la propreté du bâtiment d’élevage, considéré comme facteur majeur de risque de boiteries des bovins. L’évaluation de la propreté du troupeau est réalisée en jugeant la propreté des pattes arrières (Dufour et al. 2010) et de l’état général Interbev (2009) par des grille de notation.

 

2.4. Collecte et analyse des données

Les données de boiteries sont mesurées sur toutes les vaches. Il y a aussi la collecte des données des trois derniers contrôles laitiers qui ont été réalisées par l’Office de l’élevage et des pâturages (OEP). Les données enregistrées sont le numéro d’identification de l’animal, le numéro de lactation, le lot, la date de vêlage, la quantité de lait produite/vache, le taux butyreux(%), le taux protéique (%), les cellules somatiques et les données de locomotion. Le programme Excel 2007 a été utilisé pour calculer des moyennes, des fréquences et établir une régression entre les performances laitières et les scores de locomotion.

 

3. Résultats et discussion

3.1. Performances laitières moyennes de la SMVDA Chergui

Les performances laitières moyennes du troupeau existant au sein de la ferme Chergui sont représentées dans le tableau 1.

Tableau 1. Performances laitières moyennes du troupeau au sein de la ferme Chergui

Variable

Nombre d’observations

Moyenne

Ecart type

Production laitière (Kg/vache/jour)

972

23,6

8,85

Matière grasse (en %)

451

3,56

0,62

Matière protéique (en %)

538

3,32

0,34

Nombre de cellules somatiques (cellules/ml)

513

383720

446558

 

D’après le tableau 1, on constate que le troupeau laitier présente une production laitière moyenne de l’ordre de 23,6 Kg/vache/jour (±8,85), avec une teneur moyenne en matière grasse (MG) de 3,56 % (±0,62), celle de matière protéique (MP) de 3,32% (±0,34), un nombre de cellules somatiques égal à 383720 cellules/ml de lait produit.

On constate que les résultats obtenus pour la teneur du lait en MG et en MP sont proches de celles trouvés par Bousselmi et al. (2010) au Nord Est de la Tunisie pour la composition moyenne du lait avec 3,5% (±0,61) pour la MG et 3,19% (±0,34) pour la MP. La composition du lait de la ferme en matière grasse et en matière protéique ne concordent pas aux résultats trouvés par Ben Salem et Bouraoui (2009) chez les petits et moyens éleveurs qui sont de 3,1% et 2,89% respectivement pour la MG et la MP. Le nombre moyen de cellules somatiques est de 383720 cellules/ml de lait, qui est supérieur à 200 000 cellules/ml. Bouraoui et al. (2014) considèrent qu’il ya une perte en lait de 2% par 100 000 cellules au-delà de 200 000 cellules par millilitre de lait. Ce nombre élevé met en question l’état sanitaire du troupeau laitier. Ceci peut être expliqué par la manque d’hygiène au niveau de la traite et la fréquence des pathologies et des maladies telles que les mammites et les boiteries existants au niveau de la ferme surtout qu’une association modérément favorable à était mise en évidence par Koeck et al. (2012), entre le nombre des cellules somatiques et la mammite tout en sachant que la corrélation génétique se situe à 0,49 entre la mammite et la boiterie.

 

3.2. Incidence des boiteries

La répartition des vaches selon la grille d’évaluation de la locomotion est présentée dans la figure 2.

 

Figure 2. La répartition des vaches selon la grille d’évaluation de la locomotion de Sprecher et al. (1997)

 

La figure 2 montre que les scores 1, 2 et 3 présentent respectivement des pourcentages de 38,45%, de 22,84% et de 23,97%. Pour les scores 4 et 5, le pourcentage des vaches sont respectivement de 11,9% et de 2,84%. Ces résultats ne coïncident pas avec les résultats de Mounier et al. (2009), qui ont trouvé que dans un troupeau , 80% des vaches doivent avoir une note de 1 ou 2, moins de 15% une note de 3, moins de 4% une note de 4 et moins de 1% une note de 5.

Les boiteries doivent être détectées le plus tôt possible en observant soigneusement la démarche et le maintien des animaux. Plus l’animal présente des signes visibles de boiterie, plus le stade pathologique du pied est avancé. Les vaches qui obtiennent un score plus que 2 devraient être examinées et se faire parer les sabots pour éviter des problèmes plus graves comme ont indiqué Gourreau et Bendali (2008). Les résultats au niveau de la ferme Chergui ont montré que les vaches souffrant des pathologies des pieds présentent 38,71% (score > 2) de l’effectif total c’est un pourcentage élevé. Les vaches saines représentent 61,29% de l’effectif total. Ces résultats trouvés ne coïncident pas avec celles de Green et al. (2002) qui ont trouvés que la prévalence de boiterie en élevage laitier est de l’ordre de 2 à 20%. La présence de boiterie peut être considérée comme un problème sanitaire qui incite l’éleveur à pratiquer le parage préventif dont la pratique au niveau de la ferme est irrationnelle. La fréquence des boiteries enregistrée serait due aussi à la qualité de logement, principalement la présence de pierre dans l’aire d’exercice avec un paillage insuffisant, ainsi que l’humidité élevée en période hivernale. Par ailleurs, on oublie trop souvent que la meilleure prévention des maladies reste la surveillance et l’observation des animaux. En effet, Faye et lescourret (1989) ont rapporté que lorsque l’éleveur consacre un temps spécial pour observer son troupeau, l’incidence des boiteries diminue de 11,9% contre 16,8% en période de stabulation.

La localisation des affections podales au sein de la ferme Chergui sont représentées par la figure 3.

 

Figure 3. Localisation des affections podales

 

D’après la figure 3, on remarque que les boiteries des pattes postérieures sont les plus fréquentes avec un pourcentage de 57,3% au niveau de la ferme Chergui (figure 4), en plus on trouve que 38,2% des maladies podales sont localisés sur les pieds antérieurs (figure 5), par contre 4,49% des boiteries sont localisés sur autres régions corporelles. Ces résultats trouvés vont dans le même sens que ceux rapportés par Gourreau et Bendali (2008), qui trouvent 90% des affections podales sont localisés sur les pieds postérieurs et 10% de boiteries sont localisés sur les pieds antérieurs et autres.

 

Figure 4. Affection sur la patte postérieure

Figure 5. Affection sur la patte antérieure

 

3.3. Facteurs de risque des boiteries

3.3.1. Alimentation des vaches laitières

Les conséquences des boiteries peuvent s’expliquer par une ration mal adaptée comme a indiqué Clément (2005), très souvent et peut être trop souvent, l’alimentation est la première raison à être remise en question dans un problème de boiterie. Une ration plus riche en concentré, plus riche en amidon et plus pauvre en fibres provoque davantage de boiterie sévère, en particulier de la fourbure. Le calcul de la quantité du concentré réellement distribué en Kg/vache/jour et le calcul du rapport lait/ concentré est représenté dans le tableau 2.

Tableau 2. Quantité de concentré et lait/concentré selon la période du calendrier fourrager

Période

P1

P2

P3

P4

P5

Concentré (Kg /vache /jour)

10,43

11,35

9,92

9,46

9,26

Lait /Concentré

1,61

1,57

2

2,04

2

 

Selon les résultats indiqués dans le tableau 2, on remarque qu’il ya un excès de quantité de concentré en période 1 et période 2. Plusieurs études tendent à montrer que l’alimentation énergétique joue un rôle important dans le développement des troubles métaboliques du pied (Peterse et al. 1984). L'excès d'énergie ou d'azote dans la ration favorise ainsi l'apparition de la fourbure, ou pododermite, une inflammation de la couche conjonctive profonde au niveau de la sole (figure 6).

 

Figure 6. Lésion de panaris interdigital

 

Comme a expliqué Thierry (2013) les vaches laitières consomment des rations très riches en énergie sous forme d'hydrate de carbone, elles sont donc en permanence à la limite de l'acidose du rumen. Cette situation entraîne l'absorption de substances à effet vasculaire notamment au niveau des petits vaisseaux sanguins du pied. D’après Vagneur (2006) une ration trop acidogène peut entrainer des boiteries par fourbure, avec décollement de paroi, ulcères et déformation du sabot (figure 7).

 

Figure 7. Muraille concave (déformation du sabot fourbure chronique)

 

3.3.2. Etat du bâtiment

L’étable des vaches laitières se trouvent dans un bas fond qui favorise la stagnation des eaux provoquant une humidité très élevée qui peut induire à l’apparition des maladies podales. Le manque d’hygiène et d’humidité sont des facteurs de risque majeurs pour les boiteries d’origine infectieuses, en particulier la dermatite digité, les panaris. En effet selon Borderas et al. (2004), les tissus composant les sabots des vaches absorbent l'eau rapidement et la dureté des sabots diminue avec l'augmentation de leur contenu en eau. Ces résultats suggèrent que l'exposition, même brève, des sabots à des surfaces humides résulte en une diminution de leur dureté. L’évaluation de la propreté de la litière se fait par la notation de la propreté des pattes arrières (figure 8) et la notation de propreté de l’état général (figure 9) à l’aide des grilles proposées par Dufour et al. (2010) et Interbev (2009). Les résultats de la figure 8 indiquent que le pourcentage de la notation 0 «  très sale » est de 91,56% , on peut donc déduire que la plupart des vaches ont des pattes arrières très sales, et 7,14% des vaches ont des pattes arrières salse (note 1) par contre seulement 1,2 % des vaches ont des pattes arrière peu sale(note 2), avec absence total de vaches qui ont des pattes arrière propres (note 3). Des pattes sales constituent généralement un indicateur d’un environnement global de l’exploitation peu propre (Gourreau et Bendali, 2008). D’après la figure 9 on remarque que 18,18% des vaches ont une notation de propreté de l’état général égal à 0 « très sale », 46,32% des vaches ont une note de 1 « sale », 34,2 % des vaches ont une note de 2 « peu sale » et par contre seulement 1,3 % des vaches qui possèdent une notation de 3 « propre ».

 

Figure 8. Propreté de la litière à partir de la notation de propreté des pattes arrières

 

 

Figure 9. Propreté de la litière à partir de la notation de propreté l’état général

 

A partir de ces deux notations, la notation de propreté des pattes arrière et la notation de propreté l’état général des vaches on peut dire que la litière est sale ce qui peut causer le développement des micro-organismes pathogènes pour la santé de l’animal : un environnement sale. Le niveau de propreté des bovins peut être considéré comme un bon indicateur des conditions d’hygiène et de l’entretien général du troupeau.

 

3.4. Relation entre boiterie et production laitière

En s’appuyant sur la courbe de tendance (figure 10), on remarque que la production laitière moyenne varie selon le score locomoteur. La variation de la production laitière est expliquée par 95,63 % du score locomoteur. En outre, une variation d’une unité dans le score locomoteur induit une perte de 2,14 Kg de lait/vache/jour.

La moyenne de production laitière des vaches de score 1 est de 26,3 Kg /vache/jour et celle des vaches avec un score de 5 est de 17 Kg /vache/jour. On peut dire que la production laitière et le score des boiteries sont corrélés négativement.

 

Figure 10. Variation de la production laitière selon le score locomoteur

 

On peut donc noter une perte significative de lait de 9,3 Kg /vache/jour causé par les boiteries au sein de la ferme soit une perte de 35% de la production laitière. Ceci coïncide avec les résultats trouvés par Bouichou (2008) qui rapporte qu’une vache qui a de graves problèmes de pieds et membre peut perdre jusqu'à 36 % de sa production laitière. Les résultats obtenus affirment l’impact négatif des boiteries sur la production laitière au sein de la ferme, ces pertes sont considérées très importantes en les comparant avec ceux trouvés par Green et al. (2002) qui estiment une perte de production laitière attribuable à la boiterie à 360 Kg sur 305 jours.

Les résultats soulignent l’importance d’une détection et d’un traitement rapide des boiteries, vu la relation linéaire existant entre la gravité des boiteries et la diminution de la production laitière au sein de la ferme. Ceci peut être du à la non efficacité du traitement puisque au sein de la ferme il existe des vaches qui soufrent depuis plus qu’un an de problèmes de pathologies podales qui malgré la guérison après le traitement, elles manifestent des problèmes de pathologies podales. Dans ce sens, on peut donc mettre en cause l’effet du traitement lui-même, puisque pour tous les types de maladies podales rencontrées, les mêmes traitements et les mêmes stratégies sont appliqués. D’autre part l’état du bâtiment est en mauvaise situation, en plus une vache présentant un désordre locomoteur n’est pas toujours immédiatement traitée mais plutôt les jours qui suivent.

 

3.5. Relation entre boiteries et cellules somatiques

Selon la figure 11, on remarque que le nombre de cellules somatiques (CCS) varie selon la notation de locomotion. En effet seul un comptage des cellules somatiques du lait permet de déterminer la présence ou l’absence d’infection.

Figure 11. Variation du nombre de cellules somatiques selon le score locomoteur

 

En s’appuyant sur la courbe de tendance (figure 11), on constate le nombre de cellules somatique varie linéairement en fonction du score locomoteur. Le coefficient de détermination, étant égal à 0,573, signifie que 57,3% de la variation du nombre de cellules somatiques s’explique par la variation du score locomoteur.

On peut donc noté que le nombre de cellules somatiques et le score locomoteur sont corrélés positivement, ce qui signifie que plus le score des vaches boiteuses augmentent plus le nombre des cellules augmente dans le lait.

Pour les vaches saines, ne présentant pas de boiteries notées score 1 le nombre de cellules somatiques est égal à 286507 cellules /ml, qui est un nombre conforme à la norme (400 000 cellules/ ml) et inférieur à celui observé chez les vaches boiteuses qui ont un score 5 présentant un nombre de cellule somatique égal à 529061 cellules/ ml qui est supérieur à la norme. Ce nombre élevé peut être lié à la présence des mammites, de boiterie, environnement des vaches, l’hygiène de la salle de traite ainsi qu’à la gestion du troupeau.

 

4. Conclusion

Cette étude a montré que les pathologies podales présentent une incidence égale à 38,71% au sein de la ferme Chergui. Les boiteries des pattes postérieures sont les plus fréquentes avec un pourcentage de 57,3%. Une fréquence non négligeable qui met en doute plusieurs facteurs, tel que l’hygiène du bâtiment, l’équilibre alimentaire, la conduite de l’élevage et le confort de l’animal.

L’alimentation est la première raison à être remise en question dans un problème de boiterie. L’alimentation se base sur l’aliment concentré surtout dans les périodes 1 et 2 (lait/concentré < 2). Une ration plus riche en concentré, plus riche en amidon et plus pauvre en fibres provoque davantage de boiterie. La présence des fourbures dans l’exploitation est un indicateur du problème d’excès de concentré.

L’étable des vaches laitières se trouvent dans un bas fond qui favorise la stagnation des eaux provoquant une humidité très élevée qui peut induire à l’apparition des maladies podales. Le manque d’hygiène et d’humidité sont des facteurs de risque majeurs pour les boiteries d’origine infectieuses, en particulier la dermatite digité, les panaris qui sont présents dans l’exploitation. A partir de ces deux notations, la notation de propreté des pattes arrière et la notation de propreté l’état général des vaches on peut dire que la litière est sale ce qui peut causer les boiteries.

La production laitière est influencée par le problème de boiterie. En effet, 95,63% de la variation de la production laitière s’explique par le score locomoteur. L’augmentation d’une unité de score induit une diminution de 2,14 Kg du lait/vache/jour. Dans ce travail la perte moyenne entre les scores 1 et 5 est de 9,3 Kg /vache/jour.

La maitrise de la conduite d’élevage, du confort des animaux et de l’alimentation s’avère indispensable pour limiter les effets des maladies podales.

 

5. Références bibliographiques

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