Logo

Effects of Climate Change on Durum Wheat Productivity in Tunisian Semi-arid Zone

Attachments:
Download this file (EditionSpecial_CISEA2017_Article8.pdf)Volume spécial - CSIEA2017, Article8[Volume spécial - CSIEA2017, Article8]1103 kB

 

 

Effets des changements climatiques sur la productivité du blé dur en zone semi-aride Tunisienne

 

B. BEN NOUNA1*, H. BEN AMMAR2, M. REZIG1, A. BOUGHDIRI3, S. YACOUBI1, A. SLATNI1

 

Institut national de recherche en génie rural, eaux et forêts

Centre technique de la pomme de terre et de l'artichaut

Ecole supérieure d'agriculture de mateur

 

 

Abstract - Cereal farming is one of the pillars of Tunisian agriculture, which is clearly weakened by the effects of climate change (CC). This fragility is established through climatic and atmospheric variables such as temperature, precipitation and CO2 concentration, which are integrated mainly in the process of yield development. The aim of this work is to evaluate the effects of CC to the horizons 2020 and 2050, on durum Wheat productivity under irrigated and rainfall conditions (Variety KARIM). The study was based on exploitation of: experimental results, a mechanistic model of CERES-WheatV3.5 (Crop Environment Resource Synthesis), and the results of the 2020 and 2050 global scenarios generated by the model HadCM3. The main results of this work have shown that the effects of CC increase the maximum water consumption of durum wheat by 12%. They improve the water use efficiency of irrigated durum wheat in the order of 3.4 and 7.8% respectively in the horizons 2020 and 2050. The effects of CC on grain yield in durum Wheat, were demonstrated by the stability of this parameter under irrigated conditions and decrease by 15 % under rainfall conditions.

Keywords: Durum Wheat, Water consumption, Water use efficiency, Yield, Climate change.

 

Résumé - La céréaliculture est un des piliers de l'agriculture Tunisienne qui est nettement fragilisée par les effets des changements climatiques (CC). Cette fragilité s'établit à travers les variables climatiques et atmosphériques telles que la température, les précipitations, et la concentration en CO2, qui sont intégrées essentiellement dans le processus d’élaboration du rendement. Le présent travail vise à évaluer dans les conditions semi-arides de la Tunisie, les effets des CC aux horizons 2020 et 2050, sur le la productivité du blé dur (Variété KARIM) en conditions irriguées et en pluviales. L’étude a été basée sur l'exploitation : des résultats expérimentaux, d'un modèle mécanistique de cultures CERES-WheatV3.5 (Crop Environment Resource Synthesis), et des résultats des scénarios globaux des horizons 2020 et 2050 générés par le modèle climatique HadCM3. Les principaux résultats de ce travail, ont montré que les effets des CC augmentent de 12% la consommation en eau maximale du blé dur. Ils améliorent l'efficience d’utilisation de l’eau du blé dur en irrigué de l’ordre de 3.4 et de 7.8 % respectivement aux horizons 2020 et 2050. Les effets des CC sur le rendement en grains du blé dur, ont été manifestés par une stabilité de ce paramètre en conditions irriguées et par une diminution de 15% de ce dernier en conditions pluviales.

 

Mots clés: Blé dur, Consommation en eau, Efficience d’utilisation de l’eau, Rendement, Changements climatiques

1. Introduction

La céréaliculture est une activité ancienne du milieu agricole Tunisien. Elle occupe la plus grande superficie agricole cultivée (1.5 millions d’hectares, soit 30% des terres labourables) et représente le premier aliment de base de la population Tunisienne (Latiri, et al 2010). Elle est installée principalement dans les étages bioclimatiques semi-arides et arides supérieurs. En fait, elle est très dépendante des conditions climatiques et y est soumise souvent à des sécheresses très fréquentes entraînant des pertes considérables en rendement. Dans ce contexte, les effets du changement climatique (CC) peuvent affecter la céréaliculture avec une perte de rendement qui peut atteindre les 35% chez le blé dur (IPCC, 2007). De même, les régions semi-arides et arides situées en Afrique du Nord, ont été désignées parmi les zones les plus vulnérables aux CC (Aggarwal et al. 2009).

Le présent article se propose d’étudier les effets du CC sur la consommation en eau, le rendement et, l'efficience d'utilisation de l'eau chez le blé dur. Le choix de cette culture découle de son emplacement stratégique dans la politique agricole du pays. La zone concernée par l'étude fait partie de la basse vallée de la Medjerda.

2. Matériels et méthodes

2.1. Cadre de l'étude

L'étude est réalisée dans le cadre d'une caractérisation de l'effet des CC sur les emblavures du blé dur installées dans la basse vallée de la Medjerda. Elle intéresse les parcelles d'agriculteurs qui sont conduites en irrigué et en pluvial et deux parcelles d'expérimentation. La première relève de la Station de Recherche de l'Institut national de recherche en génie rural, eaux et forêts à Cherfech, et la deuxième fait partie du Domaine expérimental du Centre Technique de la Pomme de Terre et de l'Artichaut à Essaidda. L'étude a été conduit sur une culture de blé dur de variété Karim, caractérisée par une bonne productivité et réputée à s'adapter aux différentes variantes bioclimatiques et pédologiques.

2.2. Méthodologie et sources de données

L’évaluation des effets du CC sur le rendement, peut avoir lieu à travers plusieurs approches, tels que : l’approche biophysique basée sur la modélisation et l’expérimentation, l'approche basée sur les indices agro-climatiques, et l’approche basée sur les modèles économiques reposant sur le principe d’optimisation du profit (IPCC, 1996 ; IPCC, 1998). Parmi celles-ci, nous avons choisi l'approche biophysique qui englobe la modélisation du fonctionnement du couvert végétal et l'expérimentation. En effet, la méthodologie adoptée dans cette étude, renferme les étapes suivantes :

-Etape1 : Sélection des données observées du climat actuel (période de référence) qui constituent le scénario de référence.

-Etape 2 : Sélection des scénarios du changement climatique,

-Etape3 : Evaluation de l’impact global des CC sur la consommation en eau, le rendement et ses composantes, et la productivité du blé auprès des parcelles d’agriculteurs de la zone d’étude.

La première étape, a consisté à la sélection d'un ensemble de scénarios pour cette étude fut créé en changeant les données observées de la période de référence (1961-1990) en fonction des projections climatiques pour la Tunisie qui ont été construites sur la base des résultats du modèle climatique HadCM3 aux horizons 2020 et 2050 (http://www.ipcc-data.org/sres/hadcm3_download.html). Cette base de données couvre le territoire Tunisien avec un maillage de 55 km par 55 km. Vu que, la zone d'étude se caractérise par une superficie qui s'approche de l'unité superficielle du maillage, ce qui nous évite la désagrégation des données dans la présente étude.

La seconde étape, a concerné le choix du scénario A2 avec une augmentation absolue de température (T) de +0.8 °C et + 1.5°C respectivement en 2020 et 2050 et une réduction relative, respectivement de -8% et -15% de précipitations (P). Ainsi, le scénario IS92-a a été utilisé pour les prévisions de gaz à effet de serre CO2.

La troisième étape, s'est consacrée à l'étude de quelques modèles de cultures dont CERES-Wheatv3.5 (Ritchie, et Otter, 1985 ; Jones et al, 2003), STICS (Brisson et al, 1998), et EPIC (Williams et al, 1984) afin de choisir un outil de modélisation en fonction de la disponibilité de nos données expérimentales.

2.3. Choix du modèle et spécification des scénarios du CC

Nous avons adopté le choix de modèle CERES-Wheatv3.5 suite à sa simplicité, sa flexibilité et la finition de ses modules à simuler les rendements des cultures et ses composantes ainsi que leurs consommations en eau. En effet, nous avons utilisé le modèle CERES-Wheatv3.5 pour évaluer l’impact global du CC sur la productivité du blé dur. Pour atteindre cet objectif, nous avons procédé au calage du modèle CERES-Wheatv 3.5 à partir de ses coefficients génétiques (Tableau1). Alors que la validation du modèle a été réalisée à partir des données expérimentales des parcelles pluviales de la même culture (Tableau 1). Ce modèle a été utilisé ensuite pour simuler dans les conditions irriguées et pluviales, la consommation en eau, le rendement et ses composantes et la productivité du blé dur, et ce pour les scénarios suivants :

-Scénario 0 de référence (SC-0) : Sans CC,

-Scénario 1 (SC-1) : Avec CC à l’horizon 2020 (+0.8°C en T, -8% en P, et 398 ppm en CO2)

-Scénario 2 (SC-2) : Avec CC à l’horizon 2050 (+1.6°C en T, -15% en P, et 443 ppm en CO2)

Avec T la variable qui désigne la température absolue, P désigne la précipitation, et CO2 désigne la concentration du carbone a effet serre.

 

Tableau 1. Calage du modèle CERES-Wheatv3.5 à travers ses coefficients génétiques

Coefficients Génétiques

 

Valeurs initiales

Valeurs après calage

P1V : Coefficient de sensibilité à la vernalisation

10

70

P1D : Coefficient de sensibilité à la photosynthèse

2

2

P5 : Taux de remplissage de grain

320

320

G1 : Coefficient lié au nombre de grain par unité de matière sèche de tige à la floraison

30

12.3

G2 : Taux d’augmentation de poids de 1000 grains en condition optimale

35

33

G3 : Coefficient lié à la matière sèche d’une tige à la floraison

1

15

PHINT : Coefficient lié à la somme de température entre l’apparition des deux feuilles successives

100

100

 

3. Résultats et discussion
3.1. Effets des scénarios du CC sur la consommation en eau du blé dur

La figure1ab résume en fonction des traitements étudiés, les résultats de simulation des effets des scénarios du CC sur la consommation en eau du blé dur sous régime du confort hydrique (ETM) et celui réel (ETR). Ainsi, elle présente dans le même contexte, les résultats de simulation de l'évaporation réelle du sol et la transpiration réelle du blé dur. D'après cette figure, on a enregistré un effet des scénarios du CC SC-1 (2020) et SC-2 (2050) sur la consommation en eau à l'ETM et à l'ETR du blé dur et ce par rapport au scénario de référence SC-0. Ces effets ont abouti à une augmentation de 3 et 12% de la consommation en eau à l'ETM du blé dur respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Toute fois, la consommation en eau à l'ETR du blé dur a subi une diminution de 3 et 5% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). En effet, ces résultats, montrent que la culture du blé dur conduite en conditions réelle (à l'ETR) est affectée par la contrainte hydrique due aux effets scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050), qui se manifestent par une augmentation de la température et une diminution de la pluviométrie. En fait, la plante, s'adapte à cette contrainte hydrique en réduisant son rythme de consommation en eau réelle. Cela se justifie par une réduction du cumul de l'ETR sur l'ensemble du cycle de la culture du blé dur. Cette réduction est constaté pour les deux modes de conduite du blé dur, à savoir le pluvial et l'irrigué. Ces résultats confortent ceux obtenus par Amigues et al, 2006 et Kimurto et al. 2003. Alors qu'en régime ETM, la réduction de la pluviométrie conjuguée à des températures plus élevées peut conduire à une augmentation de la demande en eau climatique. Ces résultats corroborent avec ceux publiés par Brisson et levraut, 2010. L'évaporation réelle du sol et la transpiration réelle du blé dur ont subi aussi des effets des scénarios du CC. En ce qui concerne l'évaporation du sol, on a enregistré une diminution de celle-ci entre 5 et 10% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Cette diminution et due à l'ampleur du CC qui s'est révélé par une augmentation de la température conjuguée à une diminution des quantités d’eau disponibles au sol suite à des faibles précipitations. Pour le cas de la transpiration, on a marqué une augmentation de celle-ci entre 2 et 5 % respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Cette augmentation est due en fait, à des concentrations plus élevées de CO2 qui peuvent accélérer la croissance des plantes, donnant lieu à une augmentation de la surface foliaire et, par conséquent, à une transpiration accrue (Gedney et al. 2006). En effet, ces résultats se concordent avec ceux obtenus par González et al. 2008 et Lovelli et al.2010.

 

Figure1. Evolution de la consommation en eau maximale (ETM), réelle (ETR) du blé dur, de la transpiration réelle de la plante et de l'évaporation réelle du sol en fonction des traitements pluvial (a) et irrigué (b) et des scénarios du CC

 

3.2. Effets des scénarios du CC sur le rendement du blé dur
La figure 2ab présente l’évolution du rendement du blé dur et ses composantes en fonction des scénarios du CC SC-1 (2020) et SC-2 (2050) et du scénario de référence SC-0 et ce dans les conditions irriguées et pluviales du blé dur. Selon cette figure, on note un effet des scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050) sur le rendement et ses composantes pour les conditions irriguées et celles pluviales. Cet impact se marque comme suit par :

-Un effet positif des scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050) sur le rendement du blé dur et ses composantes en conditions irriguées. Cet avantage est signalé par une augmentation du rendement simulé à partir des scénarios du CC par rapport à celui simulé par le scénario de référence SC-0. Cette augmentation est de l'ordre de 1.2 et 2.6 % respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Cependant, on a noté, pour les mêmes conditions, une stabilité du poids d’un grain et une diminution du nombre de grains par épi. Cette diminution est de l'ordre de 19.5 et 34% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). La diminution de cette composante est à l'origine du réchauffement de la température qui est due principalement au CC qui a affecté a son tour la fertilité des épis (Thomas et al. 2003). Alors que, le nombre de grains par m² a augmenté. Cette augmentation est de l’ordre de 2.8 et 2.6 % respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). L'avantage bénéficié par cette composante est favorisé par l’augmentation de la concentration en CO2 selon les scénarios du CC. Cela, peut avoir un effet fertilisant, sur la biomasse produite et le rendement du blé dur (Betts et al.2007).

-Un effet négatif des scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050) sur le rendement du blé dur et ses composantes en conditions pluviales. Cela est traduit par une diminution du rendement simulé à partir des scénarios du CC par rapport à celui simulé par le scénario de référence SC-0. La diminution du rendement du blé dur en pluvial est évaluée à 8.2 et 15% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050).Cette diminution a affecté le nombre et de la fertilité des épis du blé dur (Olesen et al. 2000).

 

 

Figure2. Evolution du rendement du blé dur et de ses composantes en fonction des traitements pluvial (a) et irrigué (b) et des scénarios du CC

 

3.1. Effets des scénarios du CC sur l'efficience d'utilisation de l’eau chez le blé dur
3.1.1. Analyse du mécanisme physiologique de l’efficience d’utilisation de l’eau
Pour mieux analyser et discuter les effets du CC sur l’efficience d’utilisation d’eau. Il faut étudier l’efficience d’utilisation de l’eau tout en analysant le rôle respectif des composantes stomatiques et non-stomatiques qui interviennent dans la variation de la photosynthèse. Jones (1973) sépare ces deux composantes en fonction de la concentration en CO2 des espaces intercellulaires (Ci), pour une concentration en CO2 de l’air (Ca) donnée.

Le principe consiste à admettre une fonction d’offre qui exprime la photosynthèse (An) comme la densité de flux de CO2 qui traverse les stomates et la couche limite de la feuille :

An =gc (Ca-Ci)

gc étant la conductance totale (stomatique et aérodynamique) pour le CO2 et une fonction de demande qui exprime la fixation de CO2 par le mésophylle :

An = f(Ci)

L’interception des deux fonctions détermine les valeurs d’An, gc, et Ci. Ceci constitue un moyen simple pour aborder cette efficience à l’échelle foliaire en distinguant les processus diffusifs en phase gazeuse, des processus mésophyliens de la fixation du CO2 (processus non-stomatiques). Trois situations possibles peuvent alors être envisagées (Figure3).

 

 

 

Figure3. Schéma permettant d’analyser les facteurs limitants de la photosynthèse foliaire. La fonction de demande en CO2, illustrée par D1 et D2, représente l’assimilation nette de CO2 en fonction de la concentration en CO2 des espaces intercellulaires calculée par les échanges gazeux. gm représente la conductance mésophyllienne maximale et gc la conductance stomatique pour le CO2. Les modalités de régulation des échanges gazeux foliaires sont représentées par trois trajectoires différentes : a (fonction de demande constante), b (fonction d’offre constante), c (ajustement simultané des fonctions d’offre et de demande (Katerji et Bethnod, 1997).

 

-Une diminution de gc, sans modification de la relation entre An et Ci, signifie que la conductance mésophyllienne à la diffusion du CO2, gm, reste constante alors que gc diminue. Il en résulte une augmentation de l’efficience (Figure3, trajectoire a).

-Une diminution de An, sans modification de gc, signifie que gm diminue alors que gc reste constante. Il en résulte une diminution de l’efficience de l’eau (Figure3, trajectoire b)

-Une relation de proportionnalité entre An et gc, signifie qu’une diminution de la conductance mésophyllienne à la diffusion gm du CO2, provoque simultanément une diminution de la conductance stomatique gc. Il en résulte un maintien de l’efficience de l’eau (Figure3, trajectoire c)

Ces trois situations, peuvent en fait, nous conduit à analyser le comportement de l'efficience de l'eau en fonction des scénarios du CC. Surtout que, ces CC aboutissent à des conditions de hautes températures et de déficit hydrique associées à une variation de l'offre en CO2 dans l'air. En fait, La haute température et le déficit hydrique sont liés à la conductance stomatique gc, et la variation de l'offre en CO2 dans l'air est reliée à la conductance mésophyllienne à la diffusion du CO2 gm.

3.1.2. Analyse de l’efficience d’utilisation de l’eau et de ses composantes en fonction des scénarios du CC

La figure 4 présente en fonction du scénario de référence SC-0, et des scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050), l’évolution de l'efficience d'utilisation de l'eau consommée, transpirée, et de l’eau de pluie chez le blé dur conduit en conditions pluviales. D'après la figure 4, on note un effet négatif des scénarios du CC sur les efficiences de l'utilisation de l'eau consommée, et transpiré. Cet effet, est traduit par une diminution de l'efficience de l'eau consommée de l’ordre de 5.2 et 7.3 % respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Ainsi une diminution de l'efficience de l'eau transpirée est enregistrée de l'ordre de 7.3 et 15.2% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Ces diminutions (Figure3, trajectoire b) sont dues à l'augmentation de la température et au manque d'eau lié à la réduction de la pluviométrie. Toute fois, ces contraintes peuvent diminuer les efficiences d'utilisation de l’eau, notamment celle de l'eau transpirée (Fischer et al. 2006). Cependant on peut marquer une stabilité ou une légère augmentation de l'efficience de l'eau de pluie sous les scénarios du CC. Cette stabilité (Figure3, trajectoire c) pourrai être aussi justifié par l’augmentation de la densité des stomates, qui est considérée comme un facteur de tolérance à la contrainte hydrique chez le blé dur (Slama et al. 2005).

 

 

Figure 4. Evolution de l'efficience d'utilisation de l’eau consommée, transpiré, et de l’eau de pluie chez le blé dur en fonction des scénarios du CC et dans le cas du traitement pluvial

 

 

La figure 5 présente en fonction du scénario de référence SC-0, et des scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050), l’évolution de l'efficience d'utilisation de l'eau consommée, transpirée, d’irrigation, et de l’eau de pluie chez le blé dur, conduit en conditions irriguées. D'après cette figure, on observe un effet positif des scénarios du CC sur les efficiences de l'eau consommée, de l'eau d'irrigation et de l’eau de pluie. Cet avantage, est traduit par une augmentation de l'efficience d'utilisation de l'eau consommée de 3.4 et 7.8% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050).

 

 

Figure 5. Evolution de l'efficience d’utilisation de l’eau consommée, transpiré, d'irrigation et de l’eau de pluie chez le blé dur en fonction des scénarios du CC et dans le cas du traitement irrigué.

 

De même, l’efficience d’utilisation de l'eau d'irrigation, a augmenté de 1.2 et 2.6% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Alors que l'efficience d'utilisation de l'eau de pluie a augmenté de 10 et 20% respectivement aux scénarios SC-1 (2020) et SC-2 (2050). Ces augmentations (Figure3, trajectoire a) peuvent être attribuées à l’augmentation de la concentration de CO2 qui pourra avoir un effet positif sur l’efficience d’utilisation de l’eau du blé suite à l’augmentation de la photosynthèse (Stoddard et al. 2011) et ainsi de la production de grains par unité d’eau consommée. Cependant on note une stabilité de l'efficience d'utilisation de l'eau transpirée et de l'eau d'irrigation. Cette stabilité est expliquée, d’une part par l’élévation de la température dans la cavité stomatique ce qui a abouti à un vieillissement rapide de la feuille (Kimball et al. 1995), et d’autre part par l’augmentation de la densité des stomates qui peut générer des stomates de petite taille et à fermeture rapide (Slama et al. 2005).

4. Conclusion

Ce travail a pour objectif d’évaluer les effets du CC sur la consommation en eau, le rendement et l'efficience d'utilisation de l'eau chez le blé dur (la variété KARIM) conduit en conditions pluviales et irriguées. Ce travail a mis en relation l’ampleur du CC avec la production du blé dur dans une zone semi-aride Tunisienne. En effet, cette étude a permis de réaliser une approche des effets possibles du CC, à l’aide du modèle CERES-WheatV3.5, qui peut être forcé par des variables d’entrée provenant des scénarios climatiques générés par le modèle climatique HadCM3.

Les résultats de simulation des effets du CC à partir des scénarios projetés par le modèle HadCM3 aux horizons 2020 et 2050, montrent un effet négatif sur le secteur de la céréaliculture pratiquée dans les conditions semi-arides Tunisiennes. En fait ce secteur, continuera à exercer une pression croissante sur les ressources en eau en termes de quantité d’eau consommée à l’hectare. Cela est dû à une augmentation de la consommation en eau de la culture du blé dur qui sera de l'ordre de 12%. La contrainte hydrique due au CC, affectera à son tour le rendement du blé dur, notamment dans les conditions pluviales avec une diminution de 8.2 à 15 %.

Les perspectives, limites et recommandations :

- Dans ce travail nous avons présenté le modèle CERES-WheatV3.5 aux gestionnaires agricoles comme un outil d’aide à l’expérimentation. Ceci permettra aux producteurs de réfléchir sur ses pratiques agricoles, en tenant compte des interactions du système plante-sol-climat-pratiques culturales.

- L’étude des effets du CC sur le fonctionnement de la plante exige un très grand nombre de paramètres qui ne sont pas toujours facilement mesurables par l'expérimentation, ce qui limite le processus de simulation.

- De même, la détermination des variables d'entrées dans le modèle CERES-WheatV3.5 et le manque de précision des valeurs des paramètres climatiques limitent l'interprétation des résultats de simulation et le fonctionnement de la culture à long terme.

- Les résultats de la présente étude ne constituent qu’un premier pas de ce diagnostic. Ils sont à prendre avec précaution et les considérer dans leur contexte sans les dissocier des hypothèses qui ont servi à leur élaboration, et avec les approches et les outils utilisés compte tenu des limites de ces derniers.

- Plusieurs alternatives d’adaptation sont possibles à préconiser pour s'adapter au CC. Parmi ces alternatives, la mobilisation de la recherche agricole à identifier des nouveaux paquets technologiques assurant une adaptation progressive et complète du milieu agricole au CC. Néanmoins, l'efficacité de cette adaptation est liée la prise en compte des spécificités locales pour chaque site agricole sujet d'adaptation.

5. Références

Aggarwal P.K., Joshi H.C., Singh S.D., Bhatia A., Jain N., Prasad S., Chaudhary A., Gupta N., Pathak H., 2009. Agriculture and environment, In: Hand Book of Agriculture, Directorate of Information and Publication Agriculture, ICAR, New Delhi, pp. 62-92.

AMIGUES J.P., DEBAEKE B.I., LEMAIRE G., SEGUIN B., TARDIEU F., THOMAS A. (2006). Sécheresse et agriculture. Réduire la vulnérabilité del'agriculture à un risque accru de manque d'eau. Expertise scientifique collective, synthèse du rapport, INRA (France), 72p.

BETTS R.A., BOUCHER O., COLLINS M., COX P.M., FALLOON P.D.,GEDNEY N., HEMMING D.L., HUNTINGFORD C., JONES C.D.,SEXTON D.M., WEBB M.J. (2007). Projected increase in continental runoff due to plant responses to increasing carbon dioxide, Nature, Vol.448, N°7157, 1037-1041.

BRISSON N., LEVRAULT F. (2010). Changement climatique, agriculture et forêt en France : simulations d'impacts sur les principales espèces. Le Livre vert du projet CLIMATOR (2007-2010). Ademe, 336 p.

Brisson N., M. Bruno, Ripoche D., Marie H J., F. Ruget, N. Bernard, P. Gate, Florence D. Barret, R. Antonioletti, C. Durr, et al.1998. STICS: a generic model for the simulation of crops and their water and nitrogen balances. I. Theory and parameterization applied to wheat and corn. Agronomie 18 : 311-346.

FISCHER G., TUBIELLO F.N., VAN VELTHUIZEN H., WIBERG D. (2006).Climate change impacts on irrigation water requirements: global and regional effects of mitigation, 1990-2080, Tech.Forecasting Soc. Ch.

GEDNEY N., COX P.M., BETTS R.A., BOUCHER O., HUNTINGFORD C., STOTT P.A. (2006). Detection of a direct carbon dioxide effect incontinental river runoff records, Nature, Vol.439, N°7078, 835-838.

Handbook of methods for climate change impacts assessment and adaptation strategies, Editors Jan F. Feenstra, Ian Burton, Joel B. Smith, Richard S.J. Tol, version 2,IPCC, October, 1998

IPCC (Intergovernmental Panel on Climate Change), 2007. Climate Change 2007: The Physical Science Basis. Contribution of Working Group I to the Fourth Assessment Report of the IPCC. Eds: S Solomon, D Qin, M Manning, Z Chen, M Marquis, KB Averyt, M Tignor, HL Miller. Cambridge University Press, Cambridge, UK, 996p.

Jones HG. (1973). Limiting factors in photosynthesis. New Phytol 72, 1089-1094

Jones, J.W., G. Hoogenboom, C.H. Porter, K.J. Boote, W.D. Batchelor, L.A. Hunt,  P.W. Wilkens, U. Singh, A.J. Gijsman, and J.T. Ritchie. (2003). CERES.Wheat Cropping System Model. European Journal of Agronomy 18:235265. 

KIMBALL B.A., PINTER J.R. P.J., GARCIA R.L., LAMORTE R.L., WALL G.W., HUNSAKER D.J., WECHSUNG G., WECHSUNG F., KARTSCHALL T. (1995). Productivity and water use of wheat under free- air CO2 enrichment, Global Change Biol., Vol.1, 429-442.

KIMURTO P.K., KINYUA M.G., NJOROGE J.M. (2003). Response of bread wheat genotypes to drought simulation under a mobile rain shelter in Kenya, African Crop Sci. J., Vol.11, 225-234.

LATIRI K., LHOMME J.P., ANNABI M., SETTER T.L. (2010). Wheat production in Tunisia: Progress, inter-annual variability and relation to rainfall,. Europ. J. Agron., Vol.33, 33-42.

Lovelli A.,Ruget F., Katerji N., Combe L., Renard D, (2010)- Impact ofatmospheric CO2 concentration on water use efficiency of maize. Maydica 46 (2010), 75-80.

N Katerji, O Bethenod (1997). Comparaison du comportement hydrique et de la capacité photosynthétique du maïs et du tournesol en condition de contrainte hydrique. Conclusions sur l’efficience de l’eau. Agronomie : agriculture and environment. 17: 17-24

OLESEN J.E., JENSEN T., PETERSEN J. (2000). Sensitivity of field-scale winter wheat production in Denmark to climate variability and climate change, Clim. Res., Vol.15, 221-238.

Ritchie, J.T., Otter, S., 1985. Description and performance of CERES-Wheat: a user-oriented wheat yield model. In: ARS Wheat Yield Project. ARS-38. Natl Tech Info Serv, Springfield, Missouri, pp. 159-175.

Scientific-Technical Analyses-Contribution of Working Group II to the IPCC. Second Assessment Report, 1996

SLAMA A., BEN SALEM M., BEN NACEUR M., ZID, E. (2005). Les céréales en Tunisie : production, effet de la sécheresse et mécanismes de résistance, Science et changements planétaires / Sécheresse, Vol.16, N° 3.

STODDARD F., MÄKELÄ P., PUHAKAINEN T.A. (2011). Adaptation of boreal field crop production to climate change, in J Blanco & H Kheradmand (eds), Climate Change–Research and Technology for Adaptation and Mitigation InTech, Rijeka, Croatia, 403-430.

THOMAS J.M.G., BOOTE K.J., ALLEN J.R., GALLO-MEAGHER L.H.,DAVIS J.M. (2003). Elevated temperature and carbon dioxide effects on soybean seed composition and transcript abundance, Crop Science,Vol.43, N°4, 1548-1557.

Walther, G. R.; Post; E.; Convey; P.; Menzel; A.; Parmesan; C.; Beebee; T.J.C.; Fromentin, J.M.O.; Hoegh-Guldberg; A. and F. Bairlein, F. (2002)- Ecological responses to recent climate change. Nature,416: 389–395

Williams, J. R., C. A. Jones, and P.T.Dyke. (1984)-A modeling approach to determining the relationship between erosion and soil productivity. Trans. ASAE 27(1):129–144.

 

Template Design © Joomla Templates | GavickPro. All rights reserved.