A+ A A-

Situation of the camel meat sector in southeastern Tunisia: case of the governorate of Medenine

Attachments:
Download this file (EditionSpecial_CISEA2017_Article7.pdf)Volume spécial - CSIEA2017, Article7[Volume spécial - CSIEA2017, Article7]894 kB

 

Situation de la filière viande cameline dans le sud-est de la Tunisie: cas du gouvernorat de Médenine

 

C. SELMI1, M. JAOUAD2, B. FAYE3, H. RJILI4

 

1 Institut National Agronomique de Tunisie

2 Institut des Régions Arides

Le Centre Cirad de Montpellier

4 Institut National Agronomique de Tunisie (INAT)

 

Abstract - Until now, very few studies have been carried out on the camel sectors in Tunisia. This sector had little interest in public authorities and research in Tunisia. In spite of a strong state concern for red meats, studies have focused more on beef and sheep meat. Camel farms have three main vocations: meat, milk and tourism. In Tunisia, it is known that the main commercial vocation of these farms is the production of meat which constitutes the traditional sector and the only monetary source for the extensive breeding on the courses. Camel meat production is therefore a reality in southern Tunisia and particularly in Medenine governorate, but finally, nobody has a global vision of the mechanisms and operations of this sector. In this work, we propose to apprehend the study of this sector through the most structured actor; like the butcher. A socio-economic survey was conducted among 50 butchers in the area in order to obtain information about the other actors involved in this sector. Thus, the proposed study aims to delimit the camel meat sector in southern Tunisia and to promote camel breeding in the governorate of Medenine, which is a governorate producing red meat. The results of this study will provide an objective basis for possible strategies to be considered for the promotion of the livestock sector in general and in particularly, the camel sectors.

 

Keywords: sector, camel breeding, dromedary meat, butchers, governorate of Medenine.

Résumé - Très peu d’études jusqu’ici, ont été portées sur les filières camelines en Tunisie. Cette filière n’a que très peu intéressée les autorités publiques et les recherches en Tunisie. En effet, malgré une préoccupation forte de l’État pour les filières de viandes rouges, les études réalisées se sont plus focalisées sur la viande bovine et ovine. Les élevages camelins ont trois principales vocations : la viande, le lait et le tourisme. En Tunisie, on sait que la principale vocation commerciale de ces élevages est la production de viande qui constitue la filière traditionnelle et l’unique source monétaire pour l’élevage extensif sur les parcours.

La production de viande cameline est donc une réalité au Sud de la Tunisie et particulièrement dans gouvernorat de Médenine, mais au final personne n’a une vision globale des mécanismes et des fonctionnements de cette filière. Dans ce travail, nous proposons d’appréhender l’étude de cette filière à travers l’acteur le plus structuré ; à savoir le boucher. Une enquête socio-économique a été menée auprès de 50 bouchers dans la zone dans le but de se renseigner sur les autres acteurs intervenant dans cette filière. Ainsi, l’étude proposée a pour ambition de délimiter la filière de viande cameline au Sud de la Tunisie et favoriser la promotion de l’élevage camelin dans le gouvernorat de Médenine qui constitue un gouvernorat producteur des viandes rouges. Les résultats de cette étude constitueront une base objective des stratégies éventuelles à envisager pour la promotion du secteur de l’élevage en général et des filières camelines en particulier.

 

Mots clés: filière, élevage camelin, viande de dromadaire, bouchers, gouvernorat de Médenine.

1. Introduction

Le secteur des viandes rouges a fortement été impacté par les évènements survenus pendant la révolution tunisienne et que l’augmentation remarquable du prix de la viande rouge est révélatrice de problèmes de nature structurelle et organisationnelle plus profonds. La réelle difficulté que rencontre le secteur des viandes rouges, est l’incapacité des professionnels (producteurs, transformateurs, commerçants, etc.) et des pouvoirs publics d’organiser une filière digne de ce nom et de répartir équitablement les gains» (Daoud, 2013). La filière de viandes rouges est donc loin d’être optimisée et c’est à cause de la dégradation des parcours, de l’augmentation des coûts de production, des difficultés de transport des animaux ou de l’inefficience des abattoirs. En 2013, dans son rapport sur le financement du secteur agricole en Tunisie, la FAO souligne les principales contraintes qui pèsent sur la filière tels que l’absence de classification des carcasses aux abattoirs selon l’âge, le sexe et l’état d’embonpoint de l’animal, ainsi que l’absence de structures qui assurent la coordination entre les acteurs commanditaires de la filière (producteurs, commerçants d’animaux, engraisseurs, égorgeurs, commerçants de carcasses, détaillants…) et la complexité des mécanismes de régulation et la faible circulation de l’information.

En effet, malgré une préoccupation forte de l’Etat pour les filières de viandes rouges, les études réalisées jusqu’ici se sont plus focalisées sur la viande ovine et bovine. Des études sur l’amélioration des aspects techniques de production ont été réalisées comme par exemple le rapport sur la détermination des paramètres productifs des camélidés engraissés en Tunisie (Kamoun, 2011). La méconnaissance des acteurs et du fonctionnement de la filière pose un sérieux problème de pertinence des politiques de développement et de recherche. Il est donc nécessaire, pour soutenir et adapter au mieux les projets de développement territoriaux, d’analyser cette filière.

Le but de cette étude est donc d’analyser la filière viande cameline dans le gouvernorat de Médenine en se focalisant sur un l’acteur le plus structuré de la filière à une échelle régionale. Pour cela, nous avons procédé à des enquêtes socio-économiques auprès de 50 bouchers de viande cameline afin d’avoir un premier aperçu de la filière.

 

2. Matériels et méthodes

Ce travail cherche, dans un premier temps, à choisir les variables principales qui caractérisent les différents bouchers dans le gouvernorat de Médenine et ce à travers la réalisation d’une typologie des bouchers selon la nature de l’activité. Pour ce faire, nous allons utiliser les données socio-économiques d'enquête réalisée auprès de 50 bouchers qui sont répartis sur les trois délégations du Gouvernorat (Médenine, Zarzis et Benguerdene) en appliquant les méthodes d’analyse multidimensionnelles appropriées.

Dans un deuxième temps, nous identifierons les principaux groupes et les tendances discriminantes qui ont permis d'identifier les groupes stratégiques dans le but de discuter ultérieurement les différentes pratiques et les retombés éventuels sur le boucher. La démarche méthodologique a évolué par étape (figure 1) :

- Étape 1 : Analyse du tri à plat pour sélectionner les variables statistiquement significatives au plan statistique, c'est-à-dire celles qui présentent une variabilité suffisante entre les bouchers. Suite aux examens de routine sur l'information disponible en qualité et en nature, les variables suivantes ont été retenues pour caractériser les bouchers selon 3 thèmes :

  • Socio-économie : Age, formation, activité principale

  • La taille du commerce : Nombre de têtes abattues par an, espèces abattues

  • La gestion et la commercialisation : Source d’approvisionnement, période de stockage des animaux, critère de sélection de l’animal, recettes et dépenses.

- Étape 2 : Une analyse approfondie a été réalisée moyennant les histogrammes de fréquences afin de procéder à la détermination des modalités des variables.

- Étape 3 : Les analyses multidimensionnelles ont été effectuées suivant plusieurs itérations, en affinant progressivement l’ensemble des variables discriminantes.

 

Figure 1. Schéma d'analyse de la typologie des bouchers dans le gouvernorat de Médenine

 

3. Résultats et Discussion

L’analyse des valeurs propres permet de garder les quatre premiers axes proposés par l’ACP. Ils expliquent 85.31 % de l’inertie. Le plan 1-2 (figure suivante) met en valeur une opposition entre au moins quatre groupes. L’observation conjointe du cercle des corrélations des plans 1-2, de la matrice des composantes et de la qualité de la représentation, permet d’établir une liste des variables les mieux représentées, caractéristiques de la variabilité des bouchers, dont les plus importantes sont : l’âge, la taille de l’espèce abattue, l’approvisionnement annuel, la vente annuelle, la marge nette par espèce.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Figure 2. Représentation graphique des variables et des individus dans le plan 1-2 de l’analyse en composantes principales

 

La classification par la méthode des Nuées Dynamiques a été réalisée sur les quatre premiers axes de l’ACP, considérés comme les plus explicatifs de l’analyse. Cette méthode permet de prendre en considération l’ensemble des variables introduites dans l’ACP. Les 4 classes obtenues sont hétérogènes. La CAH a permis aussi d’identifier 4 classes significatives qui signifie 4 groupes des bouchers qui caractérisent le gouvernorat de Médenine :

Les bouchers multiples (G1) : Ce groupe représente 28% de l’échantillon. La moyenne d’âge des individus est de l’ordre de 51 ans, ils se sont des bouchers qui font la vente de tout type d’espèce avec la dominance de l’espèce caprine (62.26 %) suivi par l’espèce cameline qui est de l’ordre de 23 % dont seulement 1% présente la part des camelins abattus. Le nombre des têtes camelines abattues durant l’année est de l’ordre de 168 têtes et que l’approvisionnement s’effectue auprès des éleveurs et au souk local. La marge nette annuelle dégagée de l’abattage camelin est de l’ordre de 45373 DT.

Les primo bouchers (G2) : Ces bouchers regroupe 50% de l’échantillon, la moyenne d’âge des bouchers se situe au alentour de 43 ans. Ils font la vente mixte de tout espèce avec 73.87% de l’espèce caprine suivi par l’espèce ovine (14.34%) et que seulement 9% de l’espèce cameline. Le nombre des têtes camelines abattues durant l’année est de l’ordre de 18.5 têtes. L’approvisionnement se fait principalement auprès des éleveurs (41%) et au niveau du souk local (55%). La marge dégagée de la viande cameline est de l’ordre de 8747 DT.

Les bouchers low cost (G3) : Ces bouchers regroupe 14% de l’échantillon, la moyenne d’âge des bouchers se situe au alentour de 50 ans. Ils font la vente mixte de tout espèce avec 63 % de l’espèce caprine suivi par l’espèce ovine (30 %) et que seulement 1% de l’espèce cameline. Le nombre des têtes camelines abattues durant l’année est de l’ordre de 31 têtes. L’approvisionnement se fait principalement au niveau du souk local (84%). La marge dégagée de la viande cameline est de l’ordre de 11436 DT.

Les bouchers occasionnels (G4) : Ces bouchers regroupe 8% de l’échantillon, la moyenne d’âge des bouchers se situe au alentour de 54 ans. Ils font la vente mixte de tout espèce avec 57% de l’espèce caprine suivi par l’espèce ovine (17%) et que seulement 5% de l’espèce cameline. Le nombre des têtes camelines abattues durant l’année est de l’ordre de 85.5 têtes. L’approvisionnement se fait principalement au niveau du souk local (75%). La marge dégagée de la viande cameline est de l’ordre de 93105 DT.

  

Figure 3. Dendrogramme de classification hiérarchique des quatre groupes des bouchers

 

4. Conclusion

Le travail réalisé sur les trois délégations du gouvernorat de Médenine (Médenine, Zarzis et Benguerdene), nous a permis d’identifier et de catégoriser les bouchers vendant de la viande cameline. Le boucher de viande cameline est donc un acteur commanditaire dans la filière des viandes rouges qu’il effectue l’achat des animaux vifs, commande leur abattage et commercialise la viande auprès des consommateurs.

Après la Révolution tunisienne, l’image qui a été prise reflète une période d’évolution importante de la filière. En plus, le boucher n’hésite pas à réaliser d’autres fonctions techniques de manière temporaire ou permanente pour pallier les déficiences du marché. Il peut donc se substituer aux acteurs en amont de la filière dans le rôle d’éleveur, d’engraisseur, de commerçant et/ou d’égorgeur professionnel. Les bouchers n’ont donc pas tous la même place au sein de la filière. Nous avons pu déterminer quatre groupes de bouchers à travers la catégorisation de ceux-ci en se basant sur trois thèmes socio-économique, taille du commerce et la commercialisation.

La viande de dromadaire, que l’on ne cesse de décrire comme une viande d’avenir (qualités nutritionnelles, valorisation des espaces désertiques et qu’elle affiche le prix le plus bas), reste une viande de consommation familiale dans la région. Ainsi que les autres débouchés (tourisme, restauration, exportation…) restent encore hors exploration. Cette viande reste un produit marginal, ce que mène à penser à la durabilité des élevages ou faut-il s’orienter vers le développement d’autres filières ?

 

5. Références

Assiongbon Teko-Agbo (1998) : Impact socio-économique du dromadaire (Camelus dromedarius). Thèse présentée et soutenue publiquement le 11 juillet 1998 à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Dakar (Sénégal) pour obtenir le Grade de Docteur Vétérinaire (Diplôme d’Etat), 61 p.

Atelier sur la filière laitière cameline en Afrique Niamey, 5 - 8 Novembre, 2003, 10 p.

Chaker S. (2013). Etude du système de commercialisation des viandes rouges dans le sud est de la Tunisie : cas du gouvernorat de Médenine. Mémoire de fin d’étude : INAT.

Daoud K. (2013). Le prix de la viande: Un problème plus profond. Al Huffington post, 13-07-2013. [Consulté en août 2014].http://www.huffpostmaghreb.com/karim-daoud/le-prix-de-la-viande-unp_ b_3591058.html

Faye, B. (1997). Guide de l’élevage du dromadaire. Montpellier : CIRAD-EMVT, 126 p.

Faye et al. (2013). La production de viande de chameau : état des connaissances, situation actuelle et perspectives. INRA Prod. Anim., volume 26, numéro 3, 289-300.

Jaouad M., et al. (à paraître). La production de viandes rouges au sud-est de la Tunisie : Esquisse typologique des producteurs. Joint Meeting of Mountain Pastures, Mediterranean Forage resources and mountain cheese Networks, 24-26 juin 2014.

Kamoum M. et al. (2011). Détermination des paramètres productifs des camélidés Engraissés en Tunisie. Synthèse de mémoires de fin d’étude : ENSAM.

Moslah M., Hammadi M., Khorchani T. (2004). Productivité de l’élevage camelin dans les parcours du Sud tunisien in Ferchichi A. (comp.), Ferchichi A. (collab.).

Oulad Belkhir et al. (2013). La filière viande cameline dans le Sahara septentrional algérien. Revue des BioRessources, décembre 2013, volume 3, numéro 2, p. 26-34.

Ould Ahmed M. (2009). Caractérisation de la population des dromadaires (Camelus dromedarius) en Tunisie. Thèse de doctorat en sciences agronomiques : INAT.FAO (2003) : Production et santé animales. Lait de chamelle pour l’Afrique.

Réhabilitation des pâturages et des parcours en milieux méditerranéens Zaragoza : CIHEAM. Cahiers Options méditerranéennes ; n.62 2004 Pages 343-347 (pages 343)

 

 

Copyright

This article is published under license to Journal of New Sciences. This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.

CC BY 4.0