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Analysis of environmental education at school in Abidjan District (Côte d’Ivoire)
Analyse de l’éducation environnementale en milieu scolaire dans le District d’Abidjan (Côte d’Ivoire)
B.T.A. VROH1*
N.M. SOUMEILA1
K.E. N’GUESSAN 1
1 Laboratory of Botany, UFR Biosciences, University Félix Houphouët-Boigny
Abstract – Environmental Education (EE) has become an undeniable awareness tool for biodiversity management. The integration of this tool into education systems could stimulate children educational action in favor of biodiversity. This study has analyzed the anchoring of the EE in Ivorian education system. A diagnosis of primary school programs has been done. Also, primary students were intervewed about their knowledges, perceptions and experiences with environment en general and green spaces particularly. The study shown that currently, there is a punctual practice of EE in Ivorian educational system at primary level. Green spaces which can be taken as the most perceptible example of environment by children, were defined as “trees in a space”. Children’s perceptions, experiences and knowledges about green spaces are more promoted by parents commitment than school programs. The lack of academic visits in green spaces and the unsuitability of the notions about living being, biodiversity and environment in the curricula, involve confusions between these themes among children. In conclusion, the study can be used as a starting point for the strengthening of concepts related to environment, biodiversity and ecosystem services and their integration in Ivorian school curricula.
Keywords: Green space, Biodiversity, Ecosystem services, Primary school.
Résumé - L’Education relative à l’Environnement (ErE) est devenue un outil de sensibilisation incontournable dans la gestion durable de la biodiversité. Son intégration dans les systèmes éducatifs pourrait stimuler l’action éducative des enfants en faveur de la biodiversité. La présente étude a permis d’analyser l’ancrage de l’ErE, dans le système éducatif ivoirien. Elle a été réalisée à partir d’un diagnostic des programmes scolaires du cycle primaire et d’une enquête menée sur des connaissances, des perceptions et des expériences de 150 élèves de la ville d’Abidjan. L’étude a pu montrer qu’il s’opère, actuellement, une pratique ponctuelle de l’ErE en Côte d’Ivoire. Les espaces verts, pris comme l’exemple le plus perceptible par les enfants, en parlant d’environnement, sont confondus aux arbres dans un espace quelconque. Les perceptions, les expériences et les connaissances des espaces verts chez les enfants sont favorisées à la fois par les programmes scolaires et les visites desdits espaces avec les parents. La faible fréquence des visites académiques dans la nature et la partialité des notions d’être vivants et de biodiversité dans les programmes, entraînent des confusions entre ces thèmes chez les enfants. L’étude peut servir de pistes de réflexion sur l’importance, l’intégration ou le renforcement de la composante biodiversité et services écosystémiques dans les programmes scolaires.
Mots clés : Espace vert, biodiversité, services écosystémique, cycle scolaire primaire.
1. Introduction
Le terme « environnement », parfois considéré comme synonyme d'écosystème ou de milieu de vie, prend également la forme d'un ensemble culturel incluant l'habitat construit et la sphère sociale (Berthelot 2012). Ainsi, l’environnement est l’ensemble des éléments (personnes, choses, conditions), plus ou moins organisés et qui constituent, à un moment donné, un cadre vital au sein duquel un organisme se trouve consciemment ou non en relations d’interdépendance (ROCARE 2009). L’être humain dans son développement, de l’enfance à l’adulte, fait partie de l'environnement et vit une relation de réciprocité avec les autres éléments qui en composent le tout (Ayotte-Beaudet et Riopel 2015).
En milieu urbain, l’environnement dans son sens écosystémique ou de biotope, prend souvent le nom d’espace vert ; c’est-à-dire les espaces non encore bâtis, végétalisés ou arborés, boisés ou agricoles gérés par les services spécialisés d’une commune et ouverts au public (Da Cunha 2009). Il s’agit donc d’équipement public représentant un investissement pour la collectivité, et un accès permis à la population. Le rôle de ce genre d’espace en général et spécifiquement chez les enfants, a été suffisamment démontré (Rissotto et Giuliani, 2006 ; Pronovost, 2008 ; Félix, 2009 ; Dadvand et al., 2014 ; Marion, 2014). Ces espaces verts urbains sont des lieux propices pour passer du temps en famille. Ils permettent aussi d’apprendre aux enfants le respect des espaces publiques, de la nature et des autres enfants (Pronovost 2008).
La protection de l’environnement de manière globale et des espaces verts est devenue une préoccupation majeure internationale au point où la Banque mondiale agit sur les systèmes éducatifs africains à travers sa stratégie pour l’éducation vers l’horizon 2020. Dans cette stratégie, elle estime qu’une éducation de qualité favorise un développement rapide et durable (Banque mondiale 2011). Un appui technique et financier de la Banque mondiale s’avère alors conditionnel au respect de ses axes stratégiques par les pays bénéficiaires (Ayotte-Beaudet et Riopel 2015). De ce constat, il semble donc urgent de chercher à réinscrire ou à améliorer l’environnement dans le champ des « éducations à ». Cependant, dans les systèmes éducatifs et la vie quotidienne, l’on pourrait se demander : pourquoi étudier l’environnement ? Les réponses que suscite cette interrogation diverse et s’opposent parfois. Pour certains éduquer les populations à l’environnement, leur faire comprendre les liens fondamentaux existants entre environnement et développement économique et social, leur permettre de saisir la portée de leurs actions sur la qualité de l’environnement, et la qualité de la vie, sont autant d’objectifs que devraient viser les systèmes éducatifs afin d’offrir aux jeunes l’espoir d’un monde meilleur (Brahim 2002). Pour d’autres comme Sauvé (2001), à l’école, l’environnement ne doit pas devenir une matière scolaire de plus, il s’agit d’une préoccupation transversale et quotidienne liée à une question de survie, d’avenir pour tous.
L’éducation relative à l’environnement est devenue de plus en importante depuis la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement qui s’est tenue à Rio en 1992. Cette conférence a confirmé dans sa déclaration le rôle de l’éducation et l’importance d’inscrire l’éducation relative à l’environnement dans la perspective de développement durable.
En Côte d’Ivoire comme dans la majorité des pays africains, l’école joue un rôle primordialdans le changement des mentalités des jeunes. L’école doit préparer l’enfant, puis l’adolescent à mieux comprendre son environnement et à s’y insérer, de la manière la plus épanouissante sur le plan individuel, et la plus enrichissante sur le plan social. L’intérêt accordé aux enfants dans cette étude réside dans le fait que, si, des pratiques favorables à un environnement durable tenant compte de la biodiversité et des services écosystémiques, doivent être adoptées et perpétuées, les enfants constituent l’un des ponts de leur transmission d’une génération à une autre. Les programmes scolaires abordent depuis longtemps, des notions environnementales dans des disciplines telles que les Sciences et technologies, l’Histoire et Géographie, les Sciences de la Vie et de la Terre. Cependant, l’on ignore le degré d’ancrage de l’éducation relative à l’environnement dans le système éducatif ivoirien. Cette ignorance suscite la question des savoir comment cerner, dans une société en pleine mutation et confrontée à de nombreux défis environnementaux, la manière dont on éduque à l’environnement au sein de l’école ivoirienne ?
Pour répondre à cette question, l’étude s’est proposée comme objectif général de faire un diagnostic des programmes d’études de l’enseignement primaire en regard de l’éducation relative à l’environnement et un questionnement des enfants en milieu scolaire sur leurs connaissances, leur perception et leurs expériences avec les espaces verts. Spécifiquement, l’étude a visé (1) à dresser le portrait de la situation actuelle en matière d’éducation relative à l’environnement au cycle primaire de l’enseignement publique en Côte d’Ivoire et (2) évaluer les connaissances, les perceptions et les expériences en matière des espaces verts (pris comme un exemple d’environnement), des enfants en milieu scolaire.
2. Matériel et Méthodes
2.1. Site d’étude
Cette étude a été réalisée dans le District Automone d’Abidjan situé, dans la Région administrative des lagunes au Sud de la Côte d’Ivoire. Il regroupe les dix (10) communes de la ville d’Abidjan et trois (3) autres communes appartenant aux sous-préfectures de Bingerville, Songon et Anyama.Parmi ces treize (13) communes, l’étude a concerné cinq (5): Abobo, Bingerville, Cocody, Plateau et Yopougon (Figure 1). Les communes de Cocody et du Plateau sont celles qui comptent le plus d’administrations publiques dans la ville d’Abidjan. Les autres communes à savoir celles d’Abobo, de Bingerville et de Yopougon sont essentiellement constituées de quartiers résidentiels. La commune d’Abobo, est l’une des communes les plus peuplées du District d’Abidjan. La commune de Yopougon, est la plus grande en superficie, de toutes les communes de la Côte d’Ivoire.
Le dernier rapport final d’enquête de l’INS (2014) indique que 72,59 % de la population d’Abidjan est alphabète, Ce taux d’alphabétisation est le meilleur dans tout le pays qui est de 50,11 %. Dans ce district la population des élèves du primaire (privé et public) s’élève à 666 088 élèves dont 50,56 % de filles (MENET-FP 2017).
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Figure 1. Carte de localisation des sites d’étude dans le District d’Abidjan en Côte d’Ivoire |
2.2. Choix des sites et des populations étudiées
La méthode d’échantillonnage stratifié probabiliste a été utilisée pour selectionner les communes devant être concernée par l’étude dans le District d’Abidjan. Ainsi, cinq (5) communes ont été ciblées pour des enquête : Abobo, Bingerville, Cocody, Plateau et Yopougon. Dans chacune des commune, une école publique a été choisie au hasard pour y interviewer 30 élèves de différents âges, à raison de 10 par niveau.
La période de l'enfance considérée pour cette étude, concerne les élèves de 6 à 13 ans. Ainsi ont été ciblés les enfants des écoles de niveau primaire dont la tranche d’âge est généralement comprise dans cet intervalle. En effet c’est à cette tranche d’âge que les enfantsont la meilleure notion de la réalité ; la capacité à réfléchir et d’analyser les expériences passées ; la meilleure compréhension des liens de cause à effet ; ils peuvent faire la différence entre une réalité objective et une réalité subjective (Euwema 2006). Dans le cas de cette étude, seul deux enfants (1,3 %) avaient leur âge compris entre 13 et 16 ans.
Les niveaux considérés pour cette étude étaient : Cours Préparatoire 2ème année (CP2), Cours Élémentaire 2ème année (CE2) et Cours Moyen 2ème année (CM2). Le choix de ces niveaux s’explique par le faite qu’il s’agisse des fins de cycle, ce qui a permis de faire des évaluations par cycle. Au total 150 élèves ont été ainsi interrogés uniquement dans les écoles publiques.
2.3. Collecte de données
La collecte des données s’est effectuée en deux (2) phases. La première a consisté à recenser les leçons relatives à l’environnement, la biodiversité et les services écosystémiques dans les programmes, pour chacun des niveaux scolaires choisis. La seconde a concerné les entretiens avec les élèves.
La première phase (recensement des leçons) a été basée sur les programmes éducatifs et guides d’exécution du Ministère en charge de l’Education Nationale et de l’Enseignement Technique. Elle a consisté à parcourir les différents programmes scolaires des niveaux choisis. A l’aide d’une grille de lecture, il s’est agi de relever toutes les leçons, les textes et autres expressions se référant aux notions de biodiversité, des services écosystémiques, de l’environnement ou des espaces verts, et de voir comment ces notions sont abordées dans les programmes officiels.
La deuxième phase s’est déroulée à travers une enquête auprès des élèves. L’enquête a consisté à mener des entretiens par la méthode directive. Cette méthode est choisie parmi les différents types d’entretien qui existent (directif, semi-directif et libre) car l’étude a eu pour cible les enfants en milieu scolaire. Un guide d’entretien a été conçu. Il regroupait des questions avec des propositions de réponses. Une pré-enquête a été effectuée pour réajuster le guide d’entretien. Les questions abordées sont : la perception des élèves sur les espaces verts, les composantes de la biodiversité, des parcs, les expériences directes avec la nature (sorties pédagogiques, sorties avec les parents, plantation d’arbres..), l'attribution d'une valeur symbolique (importance accordée) à un espace vert, l’intérêt marqué pour l'environnement, des moments intensifs dans la nature, la constatation de signes de détérioration et tous autres facteurs qui permettent de déterminer la relation qu'une personne entretient avec son environnement. Des représentations schématiques ont été réalisées pour identifier des êtres-vivants déjà vus par des enfants lors des visites dans des espaces verts ou pour exprimer les menaces qui pèsent sur l’environnement. Cette phase d’enquête a été réalisée dans le mois de juin, en fin d’année scolaire.
2.4. Analyse des données
La première partie des analyses a concerné les programmes scolaires. Les variables relatives aux notions environnementales (nature, biodiversité et services écosystémiques) ont été rangées par niveau académique et par discipline enseignée et par commune. Ensuite, les réponses obtenues à partir du questionnaire ont été introduites (saisies) dans le logiciel Xlstat. Une analyse exploratoire des données a d’abord été réalisée soit à travers des boites à moustache (Box-plot) soit, pour faire des croisements de différentes variables du questionnaire. Les les réponses des enquêtés ont été ainsi comparées à travers des tests de Chi2. Des tests de Mann-Withney et des tests de Kruskal-Wallis ont été réalisés pour comparer des moyennes suivants les cas. Une Analyse Factorielle de Correspondances (AFC) a permis de mieux visualiser sous forme d’images les relations existantes entre des variables qualitatives niveau scolaire et les éléments de la biodiversité vus par les enfants lors des visites des espaces verts.
3. Résultats et Discussion
3.1. Notions environnementales abordées dans les programmes scolaires
L’analyse des programmes et guides d’exécution des classes de CP2, CE2 et CM2 indique qu’il y a une évolution du nombre de leçons en rapport avec les notions relatives à l’environnement. L’on observe une augmentation du nombre de leçons (9 au CP2 à 109 au CM2). Cependant, il n’en est pas de même des proportions de leçons relatives à l’environnement par rapport à l’ensemble des leçons. En effet, ces proportions passent de 37,5 % au CP2, à 28,1 % des leçons au CM2. L’évolution régressive de la proportion des leçons relatives à l’ErE pourrait-il traduire un simple manque d’engouement de la part des autorités administratives lors de la conception des programmes scolaires ? Pour notre part, même si ces proportions régressent du CP2 au CM2, elles restent relativement importantes et devraient l’être encore plus si certainement l’ErE constituait à elle seule une matière indépendante. Dans le programme des classes de CP2, c’est uniquement la discipline d’Education aux Droits de l’Homme et à la Citoyenneté (EDHC) qui traite des avantages du respect des règles d’hygiène (Tableau 1). A ce niveau, il s’agit des règles de l’hygiène corporelle et bucco-dentaire etdes conséquences liées au non-respect de ces règles. L’EDHC est d’une introduction récente (par décret n° 2012-884 du 12 septembre 2012) en lieu place de l’Education Civique et Morale (ECM) en milieu scolaire ivoirien. Au cycle primaire cette discipline permet de promouvoir l’intégration de l’enfant dans son environnement social, culturel et économique (Tanoh et Soho 2013). On commence à préparer l’enfant à se prendre en charge, à être utile à la société dans laquelle il vit. Au niveau environnemental, à ce niveau d’apprentissage, le corps et la santé des enfants sont confondus à l’environnement. Tout se passe comme si « protéger son corps c’est protéger l’environnement » et vis-versa. Dans le programme de CE2 et CM2, les thèmes traitant des notions environnementales sont recensés dans les disciplines suivantes : EDHC, Sciences et Technologies, Français et Histoire- Géographie. Pour ces deux niveaux, les leçons de l’EDHC sontégalement relatives à l’hygiène. A ce niveau, l’hygiène est abordée dans le sens de la préservation du cadre de vie par la gestion des ordures ménagères. En Sciences et Technologies, des leçons abordent la notion d’écosystème pour la première fois au CE2. Ces leçons abordent les actions néfastes de l’homme et leurs conséquences sur les êtres-vivants et les écosystèmes (les animaux, les plantes, les sols, les eaux et l’air). Par la suite, les actions de sauvegarde des écosystèmes sont abordées au CM2 (Tableau 1). Au CE2 et CM2, dans les leçons de Français des notions environnementales sont abordées à travers l’usage des thèmes et expressions tels que « l’importance de la propreté », « les règles d’hygiène », « l’eau, source de vie », « savanes et forêts », « rivières, fleuves, lagunes et mers », etc. (Tableau 1). Ces thématiques ont pour but de construire des compétences de communication à l’oral et à l’écrit chez l’élève. C’est juste pour amener ce dernier à pouvoir s’exprimer correctement à l’oral ; lire et comprendre un texte et produire des écrits variés qui respectent les règles de fonctionnement de la langue. En Histoire-Géographie, ce sont les notions d’agriculture, élevage et pêche qui sont abordées (Tableau 1), comme des activités pratiquées pour le bien-être humain. Ces leçons montrent l’importance de ces activités pour le développement économique du pays. Au niveau des classes de CE2 et CM2, les différentes disciplines qui abordent les questions environnementales mettent l’accent sur des connaissances liées à l’environnement proche des élèves, la connaissance des composantes biologiques, physiques de leur milieu de vie immédiat et l’identification des principales interrelations (le réseau alimentaire et la pyramide alimentaire) entre ces composantes au sein de son environnement. Dans les programmes examinés, dominent donc trois sortes de représentation de l’environnement : l’environnement - milieu de vie, l’environnement - nature et l’environnement-système (Ayotte-Beaudet et Riopel 2015). D’autres types de représentation de l’environnement dont l’environnement-ressource ; l’environnement-problème (Sauve 1997), sont moins mise en évidence. En d’autres termes, les notions environnementales, bien que présentes dans les programmes scolaires ivoiriens, sont imparfaitement touchées en matière de transmissions de connaissances environnementales. Ces résultats corroborent ceux de Barroca-Paccard et al. (2013) sur la notion de biodiversité dans les programmes de Sciences de la Vie et de la Terre. Ce dernier affirme que les notions de biodiversité sont partiellement enseignées même au niveau secondaire.
3.2. Profil des répondants
Les élèves interviewés sont au nombre de 150 répartis entre 89 filles (59,3 %) et 61 garçons (40,7 %). Ce taux de filles dans l’enquête est supérieur à celui de l’ensemble du district d’Abidjan (50,56 %) selon les chiffres de MENET-FP (2017) pour l’année académique concernée. Le fort taux de scolarisation des filles dans le district d’Abidjan peut se justifier par le renforcement de la sensibilisation en faveur de l’accès et de leur maintien à l’école à travers des campagnes, la mise en place des comités de veille autour des écoles, la construction de latrines séparées pour filles et garçons et le lancement du concept « Ecole, amie des enfants, amie des filles ». Pour Kamanan (2015) l’école obligatoire en Côte d’Ivoire, est une réponse à la scolarisation des filles. La moyenne d’âge des enquêtés est de 9,4 ± 1,9 ans. En tenant compte du sexe, cette moyenne d’âge est de 9,2 ± 1,7 et 9,8 ± 2,3 ans respectivement pour les filles et les garçons. L’âge maximum (16 ans) est obtenu chez les garçons (Figure 2). Le test de Mann-Withney montre que la différence entre les moyennes d’âge des garçons et des filles, n’est pas significative. Si on prend en compte le niveau scolaire, l’âge moyen des enfants de CP2 est de 7,4 ± 0,9 ans. Cette moyenne d’âge passe à 9,6 ± 1,1 ans chez les enfants du CE2 et à 11,2 ± 1,2 ans chez ceux du CM2. Le test de Kruskal-Wallis montre que les différences entre les moyennes d’âge des enfants de niveau CP2, CE2 et CM2 (garçons et filles compris) sont significatives. Sur la base des 5 communes d’enquête, l’âge moyen varie de 8,9 ± 2,5 ans à Cocody à 9,7 ± 2,3 ans à Abobo (Figure 2). Le test de Kruskal-Wallis montre que les différences entre les moyennes d’âge des enfants interviewés dans les 5 communes ne sont pas significatives.
3.3. Connaissances relatives aux espaces verts
La majorité des élèves (58,7 %.) définissent la notion d’espace vert, comme des "Arbres dans un espace " (Tableau i). Il y a d’autres qui la définissent par "Jardin botanique" (18,7 %) et par "Verdure dans un lieu" (18,7 %) et 4 % d’entre eux n’ont aucune définition à attribuer à un espace vert. Ces définitions données aux espaces verts, ne sont pas dépendantes des niveaux scolaires (Chi2 = 10,50 ; p = 0,0528). Le choix de cette définition des espaces verts comme « arbre dans un espace », s’explique par le fait que les arbres constituent dans la ville d’Abidjan, la composante principale et la plus visible des espaces verts que les enfants ont eu l’habitude de visité. En considérant la perception des élèves sur l’importance des espaces verts en milieu urbain, 57,3 % affirment que ces espaces sont très importants, 32 % estiment qu’ils sont importants et 1,3 % pensent qu’ils sont peu importants, puis enfin, 6 % trouvent que ces espaces ne sont pas importants. Cette appréciation variait d’un niveau scolaire à un autre (Tableau 2). En effet, les enfants de niveau CM2 sont les plus nombreux (27,3 %) à trouver que ces espaces verts sont très importants.
Tableau 1. Grille de répartition des notions environnementales en fonction des niveaux et par disciplines
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Disciplines par niveau |
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Forets |
Savane |
Plantes |
Eco- systèmes |
Déforestation |
Pollutions |
Feux de brousses |
Désertification |
Animaux |
Chasse |
Agriculture |
Elevage |
Pêche |
Eau |
Mer |
Lagune |
Hygiène |
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CP2 |
Français |
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Salut couleurs |
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CE2 |
Français |
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Maths |
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Sces Tech |
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H-Géo |
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EDHC |
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AEC |
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Activités coop |
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EPS |
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Salut couleurs |
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CM2 |
Français |
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Maths |
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Sces Tech |
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H-Géo |
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EDHC |
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AEC |
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Activités coop |
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EPS |
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Salut couleurs |
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Légende : Maths = Mathématiques, Sces Tech = Sciences et Technologies, H-Géo = Histoire-Géographie, EDHC = Education aux Droits de l’Homme et à la Citoyenneté, AEC = Activité d’Expression et de Création, EPS = Education Physique et Sportive ; Activité coop = Activité coopérative
Age de l’ensemble |
Sexe (Test de Mann-Withney : U = 2229,5 ; p = 0,606) |
Niveau scolaire (Test de Kruskal-Wallis : K = 105,71; p ˂ 0,0001) |
Commune (Test de Kruskal-Wallis : K = 2,5891 ; p = 0,6287) |
Figure 2. Relations entre l’âge des enquêtés et la paramètres sexe, niveau scolaire et commune d’habitation |
Par contre ceux de CP2 sont les moins nombreux (12,7 %) à trouver que ces espaces sont très importants ; ils sont en revanche les plus nombreux (2,7 %) parmi ceux qui ne trouvent aucune importance de ces espaces. Le test de Chi2 montre qu’il existe une relation significative de dépendance entre le niveau des élèves et leurs appréciations de la présence des espaces verts (Chi² = 14,751 ; p = 0,022). C’est le même constat fait par Gilles et al.(2010) au Québec dans une étude sur les attitudes des jeunes en regard de la nature, où plus des trois-quarts répondent «très important» ou «important» le fait de vivre près d’un espace vert ou d’un parc. Ces résultats se rapprochent aussi de ceux de plusieurs auteurs comme Marion (2014) dans une enquête auprès des personnes adultes. Les enfants ont approuvé l’importance des espaces verts par les différents services écosystémiques qu’ils rendent. Parmi les services que peuvent rendre ces espaces verts, les plus cités sont : la présence des produits de cueillette (fruits), des éléments d’embellissement ou d’esthétique (fleurs pour les décorations). Il s’agit donc de quelques services d’approvisionnement et des services culturels selon les grandes subdivisions de MEA (2005). Ces services écosystémiques ne sont pourtant pas clairement déclinés dans les programmes scolaires ivoiriens du cycle primaire. Les services tels que la protection des sols, la régulation du cycle de l’eau, la purification de l’air n’ont pas été cités par les élèves bien que des leçons telles que le réseau alimentaire et la pyramide alimentaire en Sciences et Technologie les abordent au CE2 et CM2.
Tableau 2. Description des réponses relatives aux connaissances des enfants sur les espaces verts |
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Questions |
Modalités de réponse |
Niveaux d'études |
Test Chi² |
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CP₂ |
CE₂ |
CM₂ |
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Définition espace vert (%) |
Arbres dans la ville |
22,7 |
16,7 |
19,3 |
Chi2 = 8,105; ddl = 4; p = 0,0528 |
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Jardin botanique |
4,7 |
6 |
8 |
|||
Verdure dans la ville |
2,7 |
10,7 |
5,3 |
|||
Appréciations des espaces verts (%) |
Très important |
12,7 |
17,3 |
27,3 |
Chi² = 14,751 ddl = 6 p = 0,022 |
|
Important |
14 |
13,3 |
4,7 |
|||
Peu important |
1,3 |
0 |
0 |
|||
Pas important |
2,7 |
2,7 |
0,7 |
|||
Visites Académiques (%) |
Oui |
1 |
3,4 |
4 |
Chi² = 4,046 ddl = 2 p = 0,132 |
|
Non |
32,3 |
30 |
29,3 |
|||
Visites Familiales (%) |
Oui |
14,7 |
21,3 |
26,7 |
Chi² = 9,249 ddl = 2 p = 0,01 |
|
Non |
18,7 |
12 |
6,7 |
|||
Lieux visités (%) |
Jardin botanique de Bingerville |
1,8 |
5,5 |
7,3 |
Chi² = 3,944 ddl = 6 p = 0,684 |
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Parc zoologique d’Abidjan |
5,9 |
11,8 |
13,64 |
|||
Plage de Port-Bouet et Grand Bassam |
6,4 |
8,6 |
10 |
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Parc du Banco |
5,5 |
7,3 |
13,6 |
|||
Autres (champ, forêt) |
0,5 |
1,4 |
0,9 |
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Utilités/Usages des espaces verts (%) |
Oxygène |
0 |
0,3 |
3,1 |
Chi² = 8,316 ddl = 10 p = 0,598
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Bois de chauffe |
1,2 |
3,1 |
2,1 |
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Fruits |
12,9 |
12,3 |
12,3 |
|||
Ombrage |
4,6 |
7,7 |
8 |
|||
Argent |
0 |
0,6 |
0,9 |
|||
Décoration |
12,3 |
10,2 |
8,6 |
|||
Menaces sur les espaces verts (%) |
Déforestation |
22,9 |
22 |
12,9 |
Chi² = 11,348 ddl = 6 p = 0,078 |
|
Feux de brousse |
4,6 |
11 |
15,6 |
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Braconnage |
2,8 |
1,8 |
3,7 |
|||
Pollution |
0 |
1,8 |
0,9 |
|||
N.B. : Les pourcentages représentent les proportions par rapport au total de 150 enfants |
3.4. Visites des espaces verts et connaissances relatives aux êtres vivants
Concernant les sorties dans le cadre académique, la majorité des élèves (92,7 %) a affirmé ne pas avoir effectué de sortie avec leur école. Seulement 7,3 % des élèves de niveau CE2 et CM2 ont pu faire une sortie dans un milieu naturel avec leur école. Le test réalisé montre que, le fait de ne pas participer à une sortie académique n’est pas dépendant du niveau scolaire (Tableau 2). Le fait que très peu d’élèves ont eu à faire des visites d’espaces verts ou en milieux naturels avec leur école, peut s’expliquer par le fait que des sorties de ce genre demandent des moyens importants pour leur exécution. Généralement les écoles ne disposent pas suffisamment de moyen financier et matériel pour effectuer ces visites même si le programme scolaire le demande. Ces visites nécessiteraient donc des frais supplémentaires aux parents d’élèves qui seraient moins réceptifs du fait de la « gratuité de l’école » au primaire, prônée par les politiques. Ce constat est relativement en cantradiction avec les objectifs des sorties académiques qui devraientêtre des moments importants pour faire découvrir à l’élève son environnement et lui apprendre des notions nouvelles (WWF-France 2013).
Pour ce qui est des sorties en famille, 62,6% des élèves disent en avoir effectuées (Tableau 2). Le résultat du test de Chi2 prouve l’existence d’un lien significatif entre les sorties familiales et le niveau des élèves (Chi2= 9,249 ; p = 0,01). En effet, les enfants de niveau scolaire plus élevé (CM2) ont enregistré le plus grand score (26,7 % des enfants) de visites des espaces verts avec les parents. Ceux de niveaux inférieurs (CE2 et CP2) ont été les moins nombreux à effectuer des visites des espaces verts avec leur parent. Globalement, le taux élevé de visites avec les parents peut s’expliquer par les connaissances de ces derniers, des bienfaits du contact avec la nature chez les enfants (Lee et al., 2011).
Les espaces les plus visités en famille sont le parc zoologique encore appelé le Zoo d’Abidjan, le parc national du Banco aussi qualifié de « poumon vert d’Abidjan », chacun avec 13,6 % des visites (Tableau 2). La situation à proximité ou à l’intérieur de la ville d’Abidjan pourrait guider le choix de ces espaces pour ces visites. C’est aussi la raison pour laquelle une très faible proportion d’enfants ont fait des visites des espaces verts en milieu rural (champ et forêt notamment, Tableau 2). Pour ces enfants, quel que soit le niveau scolaire, les usages ou l’utilité de ces espaces verts se résument majoritairement aux fruits de cueillette (37,5 %) et à la décoration (31,1 %) ; ce qui ramène aux mêmes services écosystémiques d’approvisionnement et culturels cités plus haut.
Il a été demandé aux enfants de donner les noms des êtres-vivants qu’ils connaissent ou qu’ils ont déjà vu. Les réponses à cette question (Figure 3) montrent que les enfants de CP2 citent majoritairement le cheval. Ceux de CE2 citent des animaux comme l’éléphant, la Girafe, le poisson et le cocotier comme espèce végétale. Des animaux dont l’oiseau, le perroquet, la mangouste, le papillon et le serpent sont des plus connus des enfants de CM2. Outre les arbres qui constituent les composantes majeures des espaces verts dans la ville d’Abidjan, les enfants ont une parfaite connaissance d’autres êtres-vivants ou d’autres éléments de la biodiversité. D’abord l’on peut remarquer que les plus jeunes enfants (CP2) ont une meilleure connaissance des espèces exotiques. Ensuite, les plus âgés citent l’éléphant qui est l’emblème de la Côte d’Ivoire et la Girafe qui demeurent l’un des animaux les plus grands de taille en milieu tropical. Cependant des enfants de CE2 et CM2 n’ont pas pu faire la différence entre un écosystème et les êtres vivants qui peuvent le composer. Ces derniers ont cité la forêt, la rivière et la plage comme des êtres vivants (Figure 3).La majorité des enfants interrogés ont donc du mal à cerner les différences entre les écosystèmes et les espèces qui pourraient les composer. Ces deux niveaux de biodiversité (espèce et écosystémiques) sont donc mal perçus chez les enfants interviewés lors de cette étude. Les éléments de la biodiversité observés lors des sorties par les élèves ont été représentés de façon schématique (Figure 4). Ces schémas montrent une augmentation du nombre d’éléments de la biodiversité schématisés du CP2 au CM2.
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Figure 3. Carte factorielle illustrant les relations d’indépendance entre le niveau scolaire et les être-vivantsvupar des enfants |
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Figure 4. Schématisations des êtres vivants vu lors des sorties par les élèves |
3.5. Connaissance des menaces sur les espaces verts
Sur l’ensemble des élèves interviewés, 109 enfants (72,66 %) ont reconnu au moins une menace qui contribue à la dégradation des espaces verts. Il s’agit de 30,3 % pour le niveau CP2, 36,6 % pour le niveau CE2 et 33,1 % pour le niveau CM2. Les menaces les plus citées sont la déforestation (57,8 %) et les feux de brousses (31,2 %). Le braconnage et la pollution sont les moins citées par les élèves comme menaces pour l’environnement (Tableau 2). Selon le test de Chi2, les proportions de citation de ces menaces ne dépendent pas du niveau scolaire.
Les différentes menaces ont été confirmées à travers leur schématisation (Figure 5). Les enfants de niveau CP2 n’ont pas pu traduire schématiquement ces menaces même s’ils en ont cité. Les menaces les plus schématisées au CE2 et CM2sont d’origine humaine. Ces résultats peuvent s’expliquer par le fait que généralement, dans les programmes scolaires les leçons environnementales portent le plus sur les menaces anthropiques qui pèsent sur la nature. Les connaissances des menaces par les jeunes, traduiraient leur pessimisme en ce qui concerne l’avenir de la planète, surtout avec différentes menaces environnementales auxquelles elle fait face(Gilles et al. 2010).
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